Une écriture malhabile, lente, un enfant qui souffre de crampes, cela s’appelle une dysgraphie. Le diagnostic ne pourra être affirmé qu’à partir de 7-8 ans, mais les premières difficultés apparaissent dès la maternelle. Ouvrez l’œil !
Florence Kennel
En maternelle, un enfant maladroit, “empoté”
Dès la maternelle, l’enfant dysgraphique peine à coordonner finement les gestes de ses mains : il a du mal à écrire son prénom, même en majuscules. Il rechigne à dessiner, à colorier, et les
travaux manuels ne l’attirent pas.
En grande section, même si la plupart des enfants montrent une maladresse motrice (peu savent boutonner leur pantalon en début d’année !), cet élève-là se singularise par son manque de progrès en
graphisme. Ses feuilles sont sales, gribouillées, parfois trouées tellement il appuie sur son crayon. Les mêmes difficultés motrices se retrouvent dans son comportement : il tient mal ses
couverts à table, n’arrive pas à lacer ses chaussures ou à boutonner ses vêtements tout seul en fin d’année.
Au CP, un enfant lent qui finit par détester écrire
Les difficultés explosent au CP. Car l’écriture exige beaucoup de l’enfant : il lui faut à la fois bien se représenter le mouvement à effectuer de la main (de gauche à droite, une boucle, etc.) et penser en même temps au sens de ce qu’il écrit. Pour que ça aille vite, le tracé doit devenir un automatisme, afin de permettre de se concentrer sur le sens de ce qui est écrit. L’enfant dysgraphique n’y arrive pas. Chaque tracé occupe toute son attention. Il attrape une crampe. Et il a bien conscience de son handicap. Bien souvent, il se sent alors honteux, se décourage et déclare ne pas aimer écrire.
Aider mon enfant en lui redonnant envie d'écrire
Rien ne sert de lui faire écrire des lignes et des lignes le soir à la maison. Il faut au contraire dédramatiser et privilégier des activités annexes, très proches de l’écriture et qui amènent l’enfant naturellement à tracer des formes ressemblant à des lettres. C’est d’ailleurs ce qu’il fait en moyenne section et en début d’année de grande section en classe. Pour cela, il faut que l’enfant se sente détendu : la relaxation l’aidera grandement. Le but est de lui faire sentir son bras dominant devenir lourd, puis l’autre, puis ses jambes, puis ses épaules. Il doit ensuite garder cette lourdeur (et donc cette détente) quand il écrit (d’abord debout, puis assis). Ainsi la crampe redoutée sera-t-elle évitée.
Les trucs d'instit' contre la dysgraphie
Si votre enfant est dysgraphique, une rééducation sera nécessaire (demandez conseil auprès d'un orthophoniste) ; elle dure en général six à huit mois. Mais en attendant, voici quelques trucs à
essayer à la maison.
- Variez les supports : à bas la feuille blanche traumatisante. Essayez le tableau noir (pour faire de grands gestes à la verticale) et le papier carbone (pour lui faire prendre
conscience de sa force de pression).
- Supprimez les outils qui complexent : les petits pinceaux fins, les crayons de couleur pas chers dont la mine casse sans cesse, les stylos plume. Achetez de gros pinceaux à
long manche et à brosse dure, et ronde, de diamètres variés. Double avantage : le manche oblige l’enfant à prendre du recul par rapport à son travail, à se détacher de la feuille. Et la brosse le
décomplexe car elle accuse moins les erreurs de tracés qu’un pinceau fin. Initiez l’enfant à l’aquarelle plutôt qu’à la gouache, ce qui l’obligera à peindre de façon légère, aérienne, sans notion
de « trait juste ». Et laissez-le choisir le pinceau pour qu’il s’habitue à anticiper son trait.
- Soignez la position : on écrit avec son corps. Un droitier se sert donc aussi de son bras gauche quand il écrit, pour prendre appui ou tenir la feuille par exemple. Or l’enfant
dysgraphique se crispe souvent sur le bras écrivant en oubliant l’autre. Incitez-le donc à se servir de tout le bras, du poignet, et pas seulement de ses doigts. Vérifiez dès la grande section la
prise du stylo, en évitant les pinces de crabe qui crispent les doigts.
Les lectures pour comprendre les problèmes d'écriture de mon enfant
N’attendez pas que votre enfant souffre de crampes paralysantes au collège pour réagir ! La rééducation est efficace quand elle est précoce ; parfois, elle permet à un faux gaucher de changer de
main dominante et de devenir droitier ! Pour creuser le sujet :
- un psychiatre, le Dr de Ajuriaguerra, a écrit un excellent ouvrage bourré de conseils pratiques. « L’écriture de l’enfant », et son tome II, « La Rééducation de l’écriture », Delachaux et
Niestlé, 1990.
- Danièle Dumont, une ancienne institutrice, s’est spécialisée en rééducation de l’écriture et détaille la bonne façon de tenir un stylo dans « Le Geste d’écriture », Hatier, 2006.
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